Label bas-carbone : fonctionnement, méthodes, limites enjeux
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Sommaire
Qu’est-ce que le Label bas-carbone ? C'est un dispositif français créé en 2018 (décret du 28 novembre 2018) et mis en œuvre depuis 2019, sous l’égide du ministère de la Transition écologique, en lien avec le ministère de l’Agriculture et de nombreux partenaires. Il s’agit du premier cadre de certification climatique volontaire de l’État en France. Il vise à valoriser des projets qui réduisent les émissions de gaz à effet de serre (GES) ou qui séquestrent du carbone (dans les sols, les forêts, etc.). Ceci est la théorie, l'enfer est pavé de bonnes intentions, car le lobbying détourne toujours les dispositifs afin d'en retirer un maximum de profits tout en ayant une communication contraire au faits réels.
Principaux objectifs du label
Ils sont au nombre de 4 :
- Contribuer aux engagements climatiques de la France, notamment dans le cadre de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) et de la neutralité carbone à l’horizon 2050.
- Financer des actions locales ou territoriales (agriculture, forêt, bâtiment, transports, déchets, etc.) qui dépassent les pratiques courantes ou réglementaires.
- Offrir une garantie de crédibilité, transparence et vérifiabilité aux projets : quantification fiable des réductions ou séquestrations, vérification, traçabilité.
- Permettre aux acteurs publics ou privés (entreprises, collectivités, etc.) de financer ou compenser des émissions via des crédits carbone liés à ces projets.
Fonctionnement et méthode
Voici comment marche ce dispositif compliqué. Pour qu’un projet puisse être labellisé, il doit utiliser une méthode approuvée par le ministère (via la DGEC) qui définit la façon de mesurer les émissions, de calculer la séquestration puis de vérifier les résultats. Ces méthodes précisent aussi la situation de référence (ce qui se passerait sans le projet), ce qui permet de calculer l’“additionnalité”.
Exemples de méthodes approuvées
- Dans l’agriculture, certaines méthodes Label bas-carbone sont : “Carbon’Agri” (élevage + grandes cultures), gestion des intrants, plantation de vergers, haies, etc.
- Dans le domaine forestier, des méthodes comme le boisement, la reconstitution de peuplements forestiers dégradés, la transformation de taillis en futaie sont disponibles.
Déroulement d’un projet
Le porteur de projet choisit une méthode adaptée à son secteur.
Il élabore un scénario “réel de projet” (ce qui sera fait) et un scénario “de référence” (ce qui se passerait sans intervention).
On quantifie les réductions d’émissions ou la séquestration de carbone.
Le projet doit être “additionnel” : les effets ne devraient pas se produire sans la mise en œuvre du projet ou du financement associé au label.
1) Labellisation et vérification
Le préfet de région, via les DREAL (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement), instruit les demandes.
En fin de projet ou à certaines étapes, une vérification est faite pour confirmer que les réductions ou séquestrations estimées sont concrètes.
2) Crédits carbone
Le projet labellisé génère des “crédits carbone” (ou “crédits bas-carbone”) qui peuvent être vendus ou utilisés pour compenser des émissions de GES.
On distingue plusieurs types de crédits : crédits directs vs indirects, ex-ante vs ex-post, réduction d’émissions vs séquestration.
Forces du label bas carbone
Le Label bas-carbone présente plusieurs avantages théoriques :
- Crédibilité et transparence améliorée par un cadre réglementaire qui était à sa création clair, avec des méthodes scientifiques et des vérifications indépendantes.
- Flexibilité sectorielle : agriculture, forêt, bâtiment, transport, déchets, etc. permettent d’adresser différents leviers d’action.
- Impacts multiples ou co-bénéfices : souvent en plus de la lutte contre le changement climatique, les projets labellisés peuvent améliorer la biodiversité, la qualité des sols, de l’eau, la santé, etc.
- Mobilisation financière : le label facilite le financement privé et public, offrant une incitation économique aux porteurs de projet.
Le greenwashing ou lavage de cerveau en vert est une méthode de communication présentant un produit comme vert alors qu'il ne l'est pas. Schéma Picbleu

Les limites et les dérives observées
Ce Label facilite le greenwashing et coronawashing pour certaines entreprises très polluantes qui peuvent ainsi financer des projets labellisés, communiquer sur leur « neutralité carbone » sans réduire réellement leurs propres émissions. Aussi robuste soit-il, le label doit faire face à plusieurs défis et critiques :
Scénario de référence : la définition de ce scénario est essentiel, car si le scénario de référence est trop bas ou trop optimiste, cela aboutit à une surévaluation des réductions/carbone séquestration. Certains observateurs ont critiqué des choix de référence notamment pour les projets forestiers.
Durée, permanence : la séquestration de carbone dans les sols ou les forêts doit être maintenue sur le long terme, avec des risques (incendies, maladies, changements d’usage des terres, etc.).
Additionnalité réelle : s’assurer que les actions n’auraient pas été entreprises sans l’incitation du label reste complexe.
Trajectoire des prix et marché : pour que les crédits carbone aient une vraie valeur, il faut de la demande, un prix adéquat, une confiance continue des financeurs.
Critiques sur la simplification ou la bureaucratie : certaines méthodes ou démarches sont jugées coûteuses ou lourdes à mettre en œuvre, en particulier pour les petits porteurs de projets.
Exemple de greenwashing
Certaines grandes entreprises industrielles, pétrolières ou énergétiques investissent dans des projets de reboisement ou de changement de pratiques agricoles labellisés bas-carbone simplement pour compenser leurs propres émissions croissantes, tout en continuant à développer des activités polluantes.
Industrie gazière
C'est le cas de de la société irlandaise Butagaz prise comme exemple de greenwashing en raison de sa communication intense. Voir article du JDP
Industrie agro-industrielle
Cédant à la pression d’acteurs économiques de la filière bois, le ministère de la transition écologique est revenu sur des normes qui étaient destinées à justement encadrer Le label bas carbone. Cette adaptation permettant de surestimer l’impact additionnel, en termes de stockage de CO2, des projets de reboisement « bas carbone », et donc en fin de compte créer des crédits carbone fictifs. Exposé à des critiques, le ministère a contesté cette analyse assurant que le but était d'améliorer l’intégrité environnementale de la certification dans une « démarche progressive » tout en respectant « la logique de marché ».
Réformes récentes et évolutions
Le dispositif a connu des révisions importantes récentes afin de le modifier :
En septembre 2025, un renforcement du Label bas-carbone a été annoncé pour massifier les financements privés, simplifier le montage des projets, améliorer la transparence et la robustesse.
Actualisation des méthodes forestières : de nouvelles versions pour les méthodes de boisement/reboisement récemment publiées.
Adaptation aux standards européens, notamment pour compatibilité avec les obligations de rapportage extra-financier des entreprises (CSRD, etc.).
Enjeux pour l’avenir
Voici quelques pistes et enjeux majeurs pour l’avenir du Label bas-carbone :
- Renforcer la rigueur méthodologique, notamment pour les scénarios de référence, pour garantir que les crédits carbone produits reflètent des actions réellement additionnelles et durables.
- Assurer la transparence totale du dispositif (coûts, bénéficiaires, résultats) pour conserver la confiance des citoyens et des acteurs économiques.
- Encourager la participation des petits porteurs de projet, en réduisant les barrières (coûts, complexité).
- Maintenir un équilibre entre la crédibilité scientifique et la faisabilité opérationnelle, pour que le label soit à la fois exigeant et usable sur le terrain.
- Favoriser une mobilisation nationale et locale importante, de façon à ce que les financements privés s’alignent et que les projets bas-carbone deviennent une action systématique et non marginale.
Conclusion
Le Label bas-carbone représente un outil pour la France pour structurer, encourager et financer la transition écologique, par des actions concrètes de réduction des émissions de GES et de séquestration carbone. S’il continue d’évoluer dans le bon sens, c'est-à-dire se renforcer méthodologiquement afin de gagner en transparence, il jouera un rôle central dans l’atteinte des objectifs climatiques nationaux, tout en générant des bénéfices environnementaux et sociaux collatéraux. Mais si sous le poids des lobbyings, l'exécutif cède aux pressions et au chantage ce ne sera que de la poudre aux yeux.
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